On nous dit le projet du pont d’Issy est une nouvelle façon de faire la ville, que c’est un projet écologique. En fait, il s’agit de continuer l’exploitation du foncier au profit des spéculateurs les plus combatifs en reconstruisant plus grand, plus haut, dans une rivalité ringarde pour assouvir on ne sait quel fantasme sans s’occuper du sort des femmes et des hommes qui vivent et travaillent dans la ville.
Tout est dit par habitants dans leurs remarques sur les registres de l'enquête :
- l'impossible insertion dans le site, fameuse boucle de la Seine qui, selon les documents prospectifs devrait être préservée. On se demande d'ailleurs pourquoi il aurait fallu dépenser des millions d'euros pour enfouir Isséanne au ¾ de sa hauteur pour préserver un gabarit « raisonnable » ;
- l'incroyable impact sur la vie de la zone qui n'a pas été sérieusement étudié, avec des données biaisées et des impasses flagrantes sur la sécurité, sur les déplacements, sur l'ensoleillement, sur la dynamique des vents ;
- le manque de concertation sur le développement de la ville ;
- le coût de construction et d'usage de ce projet ;
- les choix d'une clique, de part et d'autre de la Seine, depuis Levallois, la Défense, Boulogne et Issy-les-Moulineaux qui « doit » bâtir toujours plus haut pour servir des intérêts particuliers.
Seule une large mobilisation permet de relancer le débat, sur l'intérêt financier de ces opérations relevant de la cavalerie comme vient de le faire remarquer avec éclat la Cour des Comptes pour la Défense, sur le délire conjoint des élus et d'architectes mégalomanes à Boulogne ou sur le lien avec les spéculateurs à Levallois.
La tour est le symbole d’une vision futuriste datée du siècle dernier. Alors que nous plongés dans une crise majeure remettant en question notre système économique et social, à Issy-les-Moulineaux, la municipalité s'entête sur ce modèle inadapté, type Manhattan ou Shanghai, érigé en exemple de modernité à atteindre.
L'urgence, en Europe, c'est de faire évoluer la ville pour l’adapter rapidement au développement durable, de permettre à chacun de se loger en fonction de ses moyens au plus près de son activité. Si l’on veut prévoir l’avenir, il faut réinvestir la ville avec des activités non délocalisables et sortir d’une compétition imposée par l’industrie financière internationale. Cette opération, avec des surfaces de bureau de 250 000 m2 sont absurdes : plus de 12 000 emplois, qui auront été ponctionnés ailleurs et 700 nouveaux résidents alors que les besoins en logement sont considérables.
Les tours restent des gestes architecturaux héroïques et coûteux. Coûteuses en espace car les besoins de circulation des hommes et des fluides, en particulier verticales, mangent de la surface utile et rendent l’argument de la densification totalement inapproprié en ce qui les concernent à moins de les construire collées les unes aux autres. Coûteuses à la construction avec une mise en oeuvre très demandeuses de haute technologie et de matériaux qui ne respectent pas les normes environnementales. Coûteuses en maintenance pour garantir l’accès, l’usage et la sécurité du bâtiment car une tour ne peut pas fonctionner en mode dégradé. Panne d’ascenseur, coupure d’électricité et c’est la panique. Coûteuses enfin en terme d’évolution sociale en imposant un mode de vie anxiogène, coupant les occupants de la tour du reste de la ville vécue comme dangereuse avec des transports saturés et des circulations impossibles.
Coincée entre réseau ferré et autoroute urbaine, la pseudo requalification urbaine de ce quartier, incluse en dernière minute dans le projet avec les commerces et activités d’une halle Eiffel mutilée, est un exemple de mauvais aménagement urbain apportant vie au seuls moments de présence des salariés. De plus l'intégration dans le périmètre de suppression de toute limite de hauteur de la pointe aval de l'Ile St. Germain laisse craindre le pire d'une modification ultérieure du PLU pour sortir cette partie du parc de la zone boisée non constructible et rendre cette parcelle ouverte à l'urbanisation frénétique.
Lors de la réunion publique de présentation du projet, les intervenants à la solde des constructeurs ont osé affirmer que la zone du Pont d’Issy restait circulable et que l’accès en transport public y était aisé. Quiconque prend le RER, le tramway ou les bus sait que c’est un mensonge. Le projet du Pont d’Issy créera, comme à la Défense aujourd’hui, un nouveau goulot d’étrangement avec une migration supplémentaire de milliers de personnes. L’afflux de véhicules supplémentaires, il est prévu 2200 places de parking, va créer une thrombose permanente dans un secteur où la circulation est déjà totalement bloquée matin et soir sur des plages horaires de plus en plus larges.
Débouchant sur une urbanité violente, les tours de plus de 10 étages sont liées à l’égo des architectes et des élus qui veulent toujours plus gros, toujours plus haut, trouvant dans les promoteurs investisseurs des alliés de poids pour financer l’activité des constructeurs. Tout un système d’exploitation qui ne s’intéresse pas aux besoins sociaux qui réclament, en particulier à Issy-les-Moulineaux, des logements en nombre pour tous afin de rapprocher les habitants des emplois qu'ils occupent. Les personnels de service, les infirmières, les ouvriers ne trouvent plus à se loger dans une ville où tout a été fait pour favoriser la spéculation immobilière résidentielle et le développement des surfaces d'activité tertiaire.
La propagande outrancière sur les bénéfices environnementaux et sociaux de la construction de ces bureaux en grande hauteur n’arrive pas calmer le besoin d’un réel débat public sur la façon de densifier notre ville. Moderniser la ville, la faire vivable pour demain nécessite de refuser des recettes du passé remises au goût du jour avec ces projets qui se moquent de l’intérêt général et de l’avenir du bien commun. Les documents d’urbanisme comme le SDRIF ou le SCOT ont des préconisations pour Issy-les-Moulineaux à l’opposé de la situation présente et des projets de tour.
Aujourd’hui il est urgent de construire ensemble les projets pour demain. Exigeons que chaque m2 carré de foncier disponible soit consacré au logement et au cadre de vie. Pour redessiner une ville solidaire à la densité maîtrisée, des bureaux nous en avons trop. C’est du logement pour tous qu’il nous faut.
L'artlicle sur Shangai... : à frémir d'horreur, en effet! Quitterez vous votre pavillon pour ce genre d'univers?
C'est bien nouveau ça que vous raffoliez des tours! Alzheimer, quand tu nous tiens...
Rédigé par : kekulo | 01 décembre 2011 à 16:50
Votre cheminement de pensée me semble pour le moins incompréhansible.
Raisonnons avec du bon sens, loin de polémiques politiciennes. (je sais, ce n'est pas votre fort !)
Du logement OUI,, des bureaux NON , dites-vous.
Pas bête ... Vous préparez donc les futurs isséens à travailler loin d'Issy ? Idée top au niveau du développement durable, d'éloigner les isséens de leur travail ! De les obliger à prendre leur voiture pour se rendre à leur travail dans des banlieues où l'offre de transports en commun est faible !
Pour une fois, soyez responsable ! Le développement durable ne passe-t-il pas pas la densification des zones urbaines ? Par un équilibre logements-bureaux (si le projet du Pont d'Issy est majoritairement axé bureaux, ne l'isolez pas de son environnement proche où les programmes de logement réalisés ou en cours dominent largement).
J'ai rencontré récement le directeur général d'une grande société basée sur Issy et Boulogne. Il souhaite déménager pour regrouper ses effectifs, mais surtout EMBAUCHER. Vous négociez avec lui pour lui expliquer que de l'emploi, on en a trop ? Et qu'il est préférable qu'il oublie Issy ?
Et sur la philosophie des tours, je vous conseille un très bon article dans le Point du 24nov : SANGHAI. La ville du futur du siècle dernier ?
Rédigé par : CLAIRE SZABO | 01 décembre 2011 à 10:08