La promotion supérieure du travail, dispositif de promotion sociale « inventé » par la loi de 1959, avait pour objectif d’accompagner l’essor industriel de la France des 30 glorieuses. Les actions de PST, portées par la croissance économique et le plein emploi, sont un modèle de promotion sociale pour les ouvriers et techniciens engagés dans une vie professionnelle encadrée par des règles et des normes « nationales ». La PST permet de répondre aux besoins de qualification de l’industrie et prend largement en compte les souhaits individuels d’ascension sociale. Qualification et reconnaissance des diplômes sont une voie de promotion sociale et professionnelle permettant de donner une deuxième chance à des salariés qui n’ont pas eu accès aux études supérieures.
L’offre de formation du CNAM est alors entièrement construite pour répondre aux attentes de promotion sociale des auditeurs du CNAM de l’époque. Il y avait parfaite adéquation entre les besoins de l’économie, l’offre de formation du CNAM et les attentes des salariés s’engageant à leur initiative dans une démarche de formation certifiante ou diplômante.
Les évolutions de l’emploi du fait de la crise, la tertiairisation et l’explosion d’une civilisation du service entraînent un éclatement du marché du travail. Les rapports au travail sont fortement modifiés. Le temps d’accès à l’emploi s’allonge et se complexifie, les possibilités d’évolution professionnelles se réduisent et la dictature du diplôme de formation initiale devient plus prégnante avec l’élévation du niveau général d’éducation de la société.
La promotion supérieure du travail voit sa place changer dans ce monde professionnel mouvant. Les arbitrages des salariés pour s’engager dans des processus de formation sont de plus en plus difficiles entre les contraintes personnelles et professionnelles.
Pourtant, les besoins de formation ne diminuent pas. Sur la dernière décennie du XXe siècle, les effectifs du CNAM explosent, avec l’extension de l’offre à de nouveaux secteurs.
Devenir cadre, changer de métier, élargir ses compétences, sécuriser son parcours professionnel, gérer son employabilité, se donner les moyens d’être à l’aise dans son métier, rechercher une autre voie sont autant de mobiles qui justifient de venir suivre une formation « type CNAM ». Les trajectoires linéaires de promotion sociale sont maintenant minoritaires parmi nos publics. Les mobilités fonctionnelles et horizontales, des parcours plus éclatés, des amplitudes d’évolution plus faibles, des parcours « défensifs » de maintien dans l’emploi sont les caractéristiques de la promotion supérieure du travail d’aujourd’hui.
L’accompagnement de ces parcours individuels, mixant construction d’un projet de formation, VAE, offre de formation diversifiée dans ses modalités, reste bien une démarche de promotion sociale qui doit permettre à ceux qui le souhaitent de suivre leur chemin tout en garantissant une qualité suffisante pour satisfaire les différentes demandes.
Le CNAM, modestement, s’adresse aux actifs de ce pays. En emploi ou non, ils ont des besoins d’accompagnement de leurs parcours professionnels. Refondant une tradition d’éducation permanente, en redéveloppant ses liens avec le monde des entreprises et de l’emploi, il existe un besoin de formation à initiative individuelle que les politiques publiques doivent réinvestir, dans des dispositifs partagés. Ces dispositifs à la carte, accessibles en tout lieu, dans une pluralité de modalités, selon des rythmes et des temporalités multiples, prenant en compte les besoins identifiés des mondes économiques, doivent offrir une véritable reconnaissance de certification ou qualification.
Le système de formation initiale ne pourra pas couvrir l’ensemble des besoins de recrutements liés à l’allongement de la vie professionnelle et au prochain choc démographique avec le départ des babyboomeurs. Nous pourrons voir de nouveau des opportunités de progression professionnelle interne, de promotion dans les entreprises pour les salariés actifs ; nous pourrons voir apparaître des dispositifs mutualisés d’échange et d’évolution des emplois au sein des branches.
Avec la nécessité pour les salariés à se préparer à des carrières multiples, ce sont des millions de salariés qui sont concernés, à très court terme par les logiques de formation qualifiante ou diplômante. Il y a de nouveau une place pour les dispositifs publics de promotion supérieure du travail, petit élément de l'ascenseur social.
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